Les 19 et 20 mai 2022, la Young Queer Alliance (YQA) a organisé une formation pour les journalistes sur comment rapporter la problématique des personnes LGBTQIA++ dans les médias.

Cette formation d’une journée et demie, qui fait partie du projet intitulé Strengthening the inclusion and social acceptance of LGBTQIA+ persons, through policy and mindset changes, in Mauritius and Rodrigues”, financée par l’Union européenne et bénéficiant du soutien de The Other Foundation, s’est déroulée dans les locaux du Media Trust à River Court, Port-Louis. Ce projet est implementé avec le concours du Collectif Arc-en-Ciel (CAEC).

Huit médias (presse écrite et radiophonique) y ont participé aussi bien que les organisations LGBTQ à Maurice notamment la Young Queer Alliance, le Collectif Arc-en-Ciel, l’Association VISA-G et RekonekT.

Najeeb Ahmad Fokeerbux, fondateur et président de la YQA a, lors de son allocution d’ouverture, situé le contexte de la tenue de cette formation, soit dans le sillage de la Journée mondiale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie, célébrée annuellement le 17 mai et ce, depuis 2004. Cette date du 17 mai a été choisie pour commémorer le déclassement par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) de l’homosexualité de la liste des maladies mentales. Ce fut chose faite en 1990 mais non sans une lutte ardue, menée par des psychologues et des activistes des droits humains.

Cette journée demeure une opportunité pour sensibiliser les politiques, les médias, les entreprises privées, les chefs religieux, les représentants communautaires, les personnes LGBTQIA++, de même que le grand public «sur le besoin pressant d’agir par rapport aux difficultés et inégalités que vivent les personnes LGBTQIA++.» Il a souligné que le thème de cette journée internationale, soit Notre corps, nos vies, nos droits est important dans un pays comme Maurice «où les personnes LGBTQIA++ sont criminalisées, le choix individuel est contrôlé et l’essence même d’être une personne LGBTQIA++ est violée

Najeeb Ahmad Fokeerbux a fait ressortir que face à cette oppression, de plus en plus de personnes LGBTQIA++ mauriciennes émigrent ou font des demandes d’asile dans des pays où être homosexuel ou transsexuel est légal. La section 250 du Code pénal, qui pénalise le rapport sexuel entre personnes du même sexe, qui sont pourtant consentantes, a favorisé la création d’un environnement qui alimente la violence, la stigmatisation et la discrimination envers les personnes LGBTQIA++. Il a rappelé que la situation est pire pour les personnes transgenres dont la transition identitaire n’est pas légalement reconnue. «Et un vide énorme existe par rapport aux droits socio-économiques des personnes LGBTQIA++.»

En dépit de ces barrières, la Journée internationale contre l’homophobie, la transphobie et la biphobie rappelle à ces personnes qu’elles doivent oser être visibles, qu’elles doivent militer pour pouvoir aimer et plaider pour leurs droits. C’est aussi, selon le fondateur de la YQA, un moment pour les personnes Queer ayant perdu un proche en raison de la stigmatisation et de la discrimination associées au VIH/SIDA de leur rendre hommage, et qui grâce à leur lutte pour exister et vivre, ont façonné les mouvements LGBTQIA++ tels qu’on les connaît aujourd’hui.

Après avoir évoqué dans les grandes lignes le programme de ce jour et demi de formation, il a souligné que les médias sont «des acteurs majeurs de la transformation sociale et dans la lutte pour les droits des personnes LGBTQIA++.»

Chayman Surajbali, président du conseil d’administration du Media Trust, a déclaré que c’est un fait connu que les médias façonnent la façon de penser de l’opinion publique et celle à l’égard des personnes LGBTQIA++ n’y fait pas exception. Les médias enseignent aussi le comportement social aux individus. «Il fut un temps, peut-être il y a quelque 60 ou 70 ans, où les personnes LGBTQIA++ étaient opprimées, stigmatisées. Des personnes engagées et braves ont combattu ce système d’oppression et ont permis une plus grande acceptation de la communauté LGBTQIA++ parmi la société», a-t-il dit, estimant que cette communauté est moins stigmatisée de nos jours qu’autrefois.

Si la couverture médiatique a augmenté par rapport à la communauté LGBTQIA++, parfois, les terminologies employées sont mauvaises et d’autres fois, elles frisent le sensationnalisme et ne tiennent pas compte de l’impact que le récit peut avoir sur la vie réelle de ces personnes. «Le pire est que vous pouvez tomber sur des récits qui ne montrent aucune compréhension de la problématique de cette communauté marginalisée.» 

Si la visibilité accrue générée par les médias est bonne, le contexte et le contenu sont tout aussi importants. Pour mieux représenter les groupes marginalisés dans les médias, Chayman Surajbali pense qu’il faudrait utiliser un langage inclusif, qui évite les expressions excluant accidentellement ou intentionnellement les individus ou groupes particuliers. «Les médias ont un rôle à jouer dans la promotion d’un langage inclusif, y compris un langage du genre inclusif, pour éduquer le public sur la diversité. La communauté LGBTQIA++ a besoin d’être représentée positivement et pour cela, il existe des glossaires de langage inclusif», a-t-il précisé.

Avant de conclure en souhaitant que les participants en apprennent davantage sur le sujet, le président du conseil d’administration du Media Trust a rappelé qu’il ne fallait pas perdre de vue le fait que les personnes de la communauté LGBTQIA++ sont des êtres humains et qu’ils ne doivent pas être traités comme des pièces de musée.

Young Queer Alliance
Marie-Annick Savripène

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